"Il faut que la peinture serve à autre chose qu'à la peinture", Henri Matisse.
Alain Zenthner

À propos d'astronomie


La passion de l’astronomie peut naître dans l’enfance en se trouvant confronté lors de belles soirées à l’immensité du ciel étoilé le plus souvent hors les villes et leurs éclairages urbains, la rase campagne ou la montagne étant des endroits privilégiés pour leur dégagement visuel sur la voûte céleste.

L’intérêt se découvrira rarement à l’école où on n’accorde que très peu de place à cette discipline pourtant essentielle d’un point de vue existentiel. On n’en parle que de manière superflue au cours de physique dans le secondaire alors que l’astronomie devrait être un fondement de l’enseignement.

C’est une activité parascolaire, à laquelle ne participaient que quelques élèves volontaires, qui m’a permis de visiter un soir de printemps un observatoire situé à quelques kilomètres de chez moi. La montée à la tour centrale dans l’ambiance nocturne de ce bâtiment néogothique (construit en 1881) et la lente ouverture de sa grande coupole sur le ciel avaient fasciné les jeunes adolescents que nous étions. L’opérateur avait pointé le télescope (un télescope de Schmidt de 62 cm) sur les planètes Vénus et Jupiter dont on a pu observer les bandes de nuages laiteuses et orangées, son impressionnante tache rouge (un gigantesque anticyclone) et certains de ses satellites galiléens (du nom de leur découvreur Galilée : Io, Europe, Ganymède et Castillo).

Cette expérience a sans doute contribué à m’inciter à acquérir, bien des années plus tard, un télescope Dobson de 30 cm qui m’a permis d’observer depuis mon jardin toutes les planètes de notre système solaire (les telluriques : Mercure, Vénus et Mars ; et les gazeuses : Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune). La plus fascinante à observer est certainement Saturne et ses anneaux, mais ne manque pas de beauté les comètes, les amas stellaires (par exemple les Pléiades), les nébuleuses (par exemple Orion), les galaxies (par exemple le Grand nuage de Magellan, Andromède, M81, M83, M104) et bien sûr notre satellite, la Lune, sur lequel j’ai pu observer des détails de moins d’un kilomètre ainsi que notre étoile, le Soleil, au travers un filtre permettant de repérer ces éruptions et ses taches solaires (régions d’intense activité magnétique, mais plus froides).

Quand le ciel est sain il n’est pas besoin de télescope pour remarquer la traînée neigeuse qui le ceinture et qui correspond au profil de la Galaxie spirale à laquelle nous appartenons : la Voie lactée. Elle comprend entre 200 et 400 milliards d'étoiles et plus de 100 milliards de planètes.

La première étoile qu’on cherche à reconnaître depuis l’hémisphère nord, pour l’utilité de repère qu’elle peut avoir, est l’étoile polaire qui indique la direction du pôle Nord céleste. On la trouve grâce à la constellation de la Grande Ourse appelée aussi Grand chariot – mais qui ressemble plutôt à une grande casserole – en reportant cinq fois vers le haut la distance comprise entre les deux étoiles (Merak et Dubhe) qui dessine le côté vertical du bout de sa cuve. L’étoile polaire constitue l’extrémité du manche de la constellation de la Petite Ourse qui est moins lumineuse.

On peut rappeler qu’une constellation est un ensemble d'étoiles dont les projections sur la voûte céleste dessinent des figures – ce qu’on appelle des astérismes – mais que ces étoiles n’ont en réalité aucun lien entre elles. On en compte 88 en tout, 44 dans chaque hémisphère.

Dans l’hémisphère sud, c’est la constellation de la Croix du sud – entourée sur trois côtés par la constellation du Centaure et au sud par la constellation de la Mouche – qui permet de repérer le pôle Sud céleste en reportant cinq fois l’axe vertical de la croix vers le bas.

Le ciel nocturne fascine par la présence de ces objets célestes perdus dans l’infinitude de l’univers, une fascination qui suscite spontanément des questions : Où sommes-nous ? Y a-t-il une limite à l’univers ? Y a-t-il de la vie ailleurs ?

Ces grandes questions ne trouveront sans doute jamais de réponses satisfaisantes.

À la question Où sommes-nous ? On peut juste répondre que notre système solaire se trouve dans un bras spiralé de notre galaxie au deux tiers environ de son rayon, son diamètre étant plus ou moins de 120.000 années lumières. Elle se trouve elle-même dans un Groupe local de 60 galaxies qui fait partie du superamas de la constellation de la Vierge comportant entre 1.300 et 2.000 galaxies. La localisation précise de notre galaxie est relative, elle ne s’évalue que par rapport à la position d’autres galaxies ou objets célestes en mouvement permanent s’éloignant pour la plupart les uns des autres puisque notre univers est en expansion. La vitesse de la Terre autour du soleil est de 107.000 km/h, le soleil orbite autour du centre de la galaxie à 850.000 km/h et la galaxie navigue dans l’espace à une vitesse de 2,3 millions de km/h. On admet généralement que l’univers n'a ni centre ni bord, qu’il n'y a pas de point de référence particulier à partir duquel on puisse donner la localisation complète de la Terre dans l'univers.

Y a-t-il une limite à l’univers ? On ne connaît pas les limites de l’univers, ni sa forme qui n’est probablement pas sphérique, ni dans quoi il baigne. Des théories cosmologiques spéculent que notre univers ne serait qu’un univers parmi beaucoup d’autres, il ferait partie d’un multivers. Une hypothèse sans doute à jamais démontrable.

Y a-t-il de la vie ailleurs ? On peut être persuadé qu’on la découvrira au niveau cellulaire (des bactéries) bientôt dans notre système solaire ; sur Mars – sous condition de l’existence d’eau liquide en profondeur ; sur Europe – un satellite de Jupiter qui possède un océan d’eau liquide sous une croûte de glace ; ou sur Titan – le plus grand satellite de Saturne qui possède une atmosphère de densité comparable à la Terre. L’annonce de la découverte d’une forme de vie intelligente ailleurs dans l’Univers serait prodigieuse, susceptible de bouleverser la spiritualité et l’état psychologique de l’humanité, mais il est difficile d’y croire même si 100 millions de planètes dans notre seule galaxie seraient potentiellement viables, sachant que l’intelligence n’y émergerait pas nécessairement.

On peut raisonnablement estimer néanmoins que des vies intelligentes comparables à la nôtre et même plus avancées ont existé, existent et existeront dans l’univers, mais que nous ne pourrons jamais entrer en contact avec elles sauf miracle. Il est probable que toute vie intelligente s’autodétruit assez rapidement, car son principe moteur est de se développer, de se répandre spontanément ce qui est incompatible avec la modération nécessaire à sa survie à long terme dans le milieu fini, limité de la planète.

Une civilisation intelligente pour perdurer doit pouvoir contrôler sa natalité et son évolution technique afin de respecter la capacité de charge de son milieu, donc d’éviter d’épuiser ses ressources naturelles et de les polluer. Le contrôle de cette pulsion prédatrice devrait se traduire par une décroissance économique très improbable afin de revenir à l’équilibre où le temps nécessaire sera laissé aux ressources naturelles pour se régénérer. Quand on constate la soif de pouvoir et d’avoir de l’humanité, on imagine mal cette possibilité autrement que contrainte et forcée, à la suite de catastrophes majeures où une bonne partie de l’humanité aura déjà disparu.

Pour que le miracle d’un contact radio – le seul possible – ait lieu avec une civilisation extraterrestre, il faudrait que son évolution soit synchrone à la nôtre à quelques centaines d’années près au plus, ce qui est très peu probable, car les laps de temps entre les naissances d’étoiles, des systèmes planétaires et des conditions propices à l’apparition de la vie sur une planète peuvent varier de millions sinon de milliards d’années !

Les distances incommensurables rendent impossible un contact physique, quand on sait que les conditions de survie de l’humanité sont déjà en danger alors que la vitesse maximale qu’elle a pu donner à une sonde spatiale non habitée (Hélios 2) n’est que de 252.720 km/h et que l’étoile la plus proche de notre système solaire Proxima Centauri est située à une distance de 4,22 années–lumière soit 270.000 Unités Astronomiques (1 UA étant égal à la distance Terre-Soleil soit environ 150 millions de kilomètres), que la sonde Voyageur 1 lancée le 5 septembre 1977 progressant à la vitesse de 62.140 km/h n’avait parcouru le 5 décembre 2018, soit après 41 ans de voyage, que 144,9 UA. Hélios 2, la sonde la plus évoluée du point de vue de sa vitesse à l’heure actuelle aurait donc accompli 590 UA en 41 ans signifiant qu’elle mettrait 18.763 ans pour atteindre Proxima Centauri !

On voit donc que la marge de progrès à accomplir pour voyager vers une exoplanète habitable est gigantesque dans un laps de temps où le souci primordial va être d’organiser la survie de l’humanité.

Proxima b, planète de Proxima Centauri, serait potentiellement habitable sur une de ses faces – car sa période de rotation étant égale à sa période de révolution comme notre Lune, une seule de ses faces est exposée à la lumière de son étoile – à condition aussi qu’elle ait gardé son atmosphère. Il existe un projet d’envoyer vers elle des nano-sondes pourvues de capteurs et caméras propulsées par des lasers depuis la Terre à un cinquième de la vitesse de la lumière, ce qui ramènerait le temps de voyage à 25 ans environ à quoi il faut ajouter 4,2 ans pour en recueillir les premières images. Mais quant à un voyage de vaisseau habité il sera sans doute à jamais impossible…

Compter sur une intelligence extraterrestre qui posséderait les techniques de déplacement dans l’espace lui permettant de nous rendre visite et d’accélérer notre progrès est aussi illusoire, car si la vie s’est développée ailleurs elle ne peut l’avoir fait que sur les mêmes principes, à quelques variantes près, que sur notre planète. Même des cerveaux beaucoup plus gros que celui de l’Homo sapiens ne seraient en mesure d’outrepasser les lois universelles de la physique. On ne peut donc pas croire aux OVNI malgré les milliers d’observations recensées dans le monde. Il faut croire qu’il s’agit de phénomènes naturels ou surnaturels inexpliqués, de tests de prototypes d’avions militaires, de mises en scène, etc.

L’humanité restera donc très certainement face à elle–même. Les seules possibilités de migration se limiteront à notre satellite la Lune et à notre planète voisine Mars. Mais ces deux extensions possibles resteront artificielles puisqu’on devra y créer des conditions propices à la vie qui resteront dépendantes des ressources de la Terre à moins de réussir une « terraformation » peu probable de la planète Mars : modification de son climat, de sa surface et de son atmosphère – la température martienne moyenne étant de -63°C, la surface désertique, composée d’hématite, ne permettant pas des conditions d’existence de plantes ou d’animaux, l’atmosphère se composant de 96% de dioxyde de carbone ou gaz carbonique, sa pression étant le centième de celle sur Terre et ne protégeant pas de l’irradiation.

Néanmoins, l’humanité installera sans doute une station habitée en permanence sur Mars, car elle se justifie plus que sur la Lune vu qu’on peut en revenir en trois jours alors qu’il en faut deux cents pour atteindre Mars.

Si les personnes pas trop âgées à l’heure où j’écris peuvent espérer assister au premier pas d’un humain sur la planète Mars – une femme de préférence, pour sa valeur symbolique de porteuse de vie et comme signe d’évolution des mentalités, celui-ci ne signifiera pas que l’humanité pourra la conquérir, les échecs dans l’évolution humaine étant nombreux. On se souviendra qu’un demi-siècle après le premier pas sur la Lune - un pas de géant pour l’humanité selon Niel Amstrong – l’humanité en est resté là.

Il reste que ce premier pas sur la planète Mars sera la démonstration de l’indéfectible volonté de l’humanité à se répandre, à coloniser l’espace dans la mesure de ses moyens. On peut envisager techniquement ce vol habité dans une vingtaine d’années (vers 2040) s’il y a une volonté politique et donc un minimum d’intérêts économiques à court terme… Mais les problèmes qui restent à résoudre sont nombreux : la technique de propulsion surtout pour le retour, le système de support de vie en circuit fermé pendant 900 jours, la fiabilité des équipements, les problèmes physiologiques découlant de l’absence de gravité, les effets des rayonnements sur l’organisme et les problèmes psychologiques…

(Extrait de mon Abécédaire auxiliaire)
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